À Rabat, le 17 décembre 2025, la cérémonie de lancement de l’Offre Startup Venture Building (VB) a réuni plus de 250 acteurs du secteur numérique. La ministre Amal El Fallah Seghrouchni a donné le coup d’envoi à une dynamique inédite, portée par la vision Maroc Digital 2030 et le Digital Startup Fund géré par
Tamwilcom. Ce dispositif inédit répond à un défi longtemps souligné par les entrepreneurs et investisseurs : l’absence d’une offre structurante, capable d’accompagner les startups de l’idéation au scaling, et d’injecter massivement des moyens financiers et humains dans les projets les plus prometteurs.
Vers un écosystème digital structuré
La stratégie Maroc Digital 2030 vise des objectifs chiffrés : 240 000 emplois créés dans le secteur numérique et 40 milliards de dirhams d’exportations de services digitaux à l’horizon 2030. Pourtant, l’écosystème marocain, malgré des succès notables (Jokkolabs, StartUp Maroc), souffrait d’un déficit en structures de venture building, un modèle qui a fait ses preuves dans des places fortes comme l’Égypte ou les Émirats arabes unis. L’Offre Startup VB corrige ce déséquilibre, avec une réponse adaptée à la réalité des porteurs de projets marocains : un accompagnement complet dès l’idéation, couplé à des mécanismes financiers puissants.
Le budget initial de 700 millions de dirhams (issus du Digital Startup Fund) vient renforcer une gamme d’outils déjà amorcée avec l’Offre Venture Capital (VC). Cette articulation permet d’attirer à la fois les investisseurs privés et de nourrir un vivier de startups prêtes à franchir les étapes critiques de leur développement.
Sélection des opérateurs : ancrage local, ouverture internationale
À l’issue d’un appel à manifestation d’intérêt lancé en octobre 2024, six opérateurs ont été retenus pour orchestrer le déploiement national du programme. CEED Maroc et Technopark représenteront l’expertise locale, tandis que Flat6Labs (Égypte), Open Startup International, Renew Capital LLC et 500 Global (États-Unis) apporteront leur expérience internationale et leur capacité à scaler des startups au-delà des frontières.
Voici le détail des structures retenues, leurs origines, spécialités et capacités :
|
Opérateur
|
Origine
|
Spécialités principales
|
Capacité prévue
|
|
CEED Maroc
|
Maroc
|
Incubation early-stage, mentorat
|
150 startups
|
|
Technopark
|
Maroc
|
Accélération tech, infrastructures
|
120 startups
|
|
Flat6Labs
|
Égypte
|
Venture building MENA, scaling
|
140 startups
|
|
Open Startup International
|
International
|
Open innovation, corporate venturing
|
100 startups
|
|
Renew Capital LLC
|
International
|
Fintech, growth funding
|
130 startups
|
|
500 Global
|
États-Unis
|
Accélération globale, scaling
|
160 startups
|
Chacune de ces structures accompagnera les projets à toutes les étapes : idéation, incubation, accélération commerciale et scaling. Cette pluralité d’acteurs garantit l’adaptation des accompagnements à la diversité des profils et filières, tout en intégrant les dernières tendances technologiques : intelligence artificielle, fintech, e-commerce, cybersécurité.
Des dispositifs financiers inédits
L’innovation du dispositif marocain réside autant dans l’accompagnement que dans les outils financiers proposés. Le guichet unique digital, géré par
Tamwilcom, donne accès à une série de leviers inédits sur le marché national :
- Bourse de vie : un revenu mensuel jusqu’à 10 000 dirhams pendant 12 à 24 mois, sécurisant les fondateurs dans les phases d’incubation.
- Bourse d’incubation : subventions jusqu’à 300 000 dirhams pour accélérer le prototypage du MVP, sans contrepartie remboursable.
- Prêts d’honneur : jusqu’à 500 000 dirhams, sans intérêt, pour accompagner le go-to-market.
- Prêts d’amorçage : de 500 000 à 2 millions de dirhams, à taux préférentiels, pour la phase de scaling.
Le financement, entièrement piloté par le MTNRA via Tamwilcom, permet de lever l’un des principaux freins à l’entrepreneuriat : la contrainte financière récurrente. À cela s’ajoutent des subventions ciblées pour chaque opérateur, afin d’adapter les parcours d’accompagnement à la réalité des porteurs de projets.
Mentorat, infrastructures et accès à l’investissement
L’Offre VB s’appuie sur un réseau de 500 mentors mobilisés, issus de l’écosystème national et international, pour garantir un transfert de compétences concret. Les bénéficiaires ont accès à des espaces de coworking, à une palette d’infrastructures mutualisées et à des événements réguliers (demo days, pitch sessions) pour connecter les startups aux investisseurs.
Le suivi personnalisé, adossé à des indicateurs de performance précis (taux de survie, génération d’emplois, chiffre d’affaires), permet de mesurer l’impact réel de chaque programme. Saïd Jabrani, DG de Tamwilcom, insiste sur la capacité du dispositif à « décharger les porteurs de projets », soulignant une ambition forte : passer d’un modèle basé sur la sélection de quelques licornes potentielles à une dynamique de masse.
Un impact mesurable et une ambition territoriale
L’objectif affiché est la création de 800 startups matures, 5 000 emplois directs et l’induction de 10 milliards de dirhams d’investissements privés sur trois ans. La stratégie cible une répartition territoriale équilibrée : Casablanca, Rabat, Fès et Agadir concentreront les premiers programmes, avec une volonté affichée d’inclure 40 % de projets féminins et 30 % issus de régions sous-équipées.
À l’échelle nationale, le Maroc compte environ 3 000 startups, dont 20 % opérant déjà dans le digital. L’accélération prévue par l’Offre VB devrait renforcer la capacité du pays à exporter des services numériques, pilier central de Maroc Digital 2030, tout en consolidant la place du Royaume comme hub régional.
Comparaison internationale et réponses aux défis structurels
Face à des modèles comme Flat6Labs en Égypte (plus de 300 startups accélérées) ou les dispositifs des Émirats arabes unis, le Maroc affirme sa montée en maturité. Les défis restent de taille : la rétention des talents, avec un risque de brain drain, et la nécessité d’une régulation adaptée, en particulier après la promulgation de la loi startups en 2022.
Le programme intègre des clauses d’impact sociétal et un suivi par KPI, visant un taux de survie de 70 %. Cette gouvernance orientée résultats marque une volonté de faire du venture building un levier de transformation systémique, loin des approches dispersées du passé.
Perspectives : vers une synergie renforcée
À court terme, un appel à candidatures pour les startups ouvrira dès janvier 2026 via le portail du MTNRA. Pour amplifier l’impact, la stratégie publique doit renforcer les partenariats avec les grandes entreprises et institutions financières (banques, OCP) et intégrer l’intelligence artificielle au cœur des programmes d’accompagnement.
Tamwilcom prévoit par ailleurs une enveloppe additionnelle de 1 milliard de dirhams dédiée au Venture Capital, en synergie avec le Venture Building. Ce continuum permettra de fluidifier le passage de l’amorçage à la croissance, assurant un financement continu et une montée en puissance des projets les plus prometteurs.
Chiffres-clés de l’Offre Startup Venture Building
• 700 millions DH : budget du programme
• 800 startups accompagnées sur 3 ans
• 5 000 emplois directs créés
• 10 milliards DH d’investissements privés attendus
• 40 % de projets féminins, 30 % issus de régions sous-équipées
• 500 mentors mobilisés
• 6 opérateurs sélectionnés (2 marocains, 4 internationaux)
Avec le déploiement de l’Offre Startup Venture Building, le Maroc affirme sa capacité à fédérer, investir et innover sur le terrain du numérique. Cette dynamique, alliant ambition institutionnelle et pragmatisme opérationnel, place le Royaume sur la carte des hubs digitaux du continent, et offre aux entrepreneurs, de Casablanca à Agadir, une rampe de lancement inédite. Pour les porteurs de projets, l’appel à candidatures imminent ouvre une fenêtre d’opportunité : s’inscrire dans un élan collectif et bâtir les entreprises numériques de demain.