Dans les comités d’investissement, l’executive summary fait partie des éléments que les évaluateurs lisent en premier. Pourtant, c’est aussi l’une des slides les plus bâclées par les fondateurs. Certains alignent un bloc de texte illisible, d’autres recopient simplement leur “vision”, d’autres encore y placent une liste de buzzwords.
Pourtant, cette slide n’est ni un slogan ni un résumé publicitaire. C’est une synthèse stratégique qui doit permettre à l’investisseur de comprendre le projet, son utilité, sa cible et son potentiel, avant d’entrer dans les détails.
1. Clarifier avant de convaincre : la fonction réelle de l’executive summary
L’executive summary n’a pas pour objectif de “vendre” le projet, mais de poser les bases. Il permet à l’investisseur de comprendre immédiatement les éléments structurants : quoi, pour qui, comment et pourquoi maintenant.
Cette slide se situe généralement dans les premières pages du deck. Elle prépare la lecture en donnant un aperçu du problème traité, de la solution proposée et de la logique économique sous-jacente.
Beaucoup de fondateurs marocains font l’erreur de vouloir impressionner dès cette slide, en ajoutant un maximum d’arguments. Le résultat est souvent confus : des phrases trop longues, un vocabulaire abstrait ou des données sorties de leur contexte. Un executive summary efficace privilégie la précision à la quantité.
Il doit répondre à trois questions fondamentales :
Quel problème concret traitez-vous ?
Pour quelle cible, et avec quel niveau d’urgence ?
Quelle est la proposition principale qui structure votre projet ?
Ces questions peuvent sembler simples, mais elles révèlent souvent des zones floues dans le modèle du fondateur. Un executive summary clair est la preuve que la réflexion stratégique est aboutie.
Pour un investisseur marocain, cette slide représente un premier filtre de sérieux. Elle montre la capacité du fondateur à structurer sa pensée, à synthétiser et à se concentrer sur l’essentiel. Dans un contexte où les décisions doivent être rapides, ce type de clarté est valorisé, surtout lors des phases de présélection dans les CRI, chez Tamwilcom ou lors des programmes universitaires.
2. Synthétiser sans affaiblir : comment transmettre beaucoup en peu de mots
Le défi de l’executive summary tient à son format : court, mais riche. Il doit intégrer suffisamment d’informations pour orienter la lecture, sans tomber dans l’excès de détails. Les investisseurs marocains, comme leurs homologues internationaux, recherchent une formulation rigoureuse, structurée et lisible.
Un executive summary opérationnel comprend généralement :
une phrase de positionnement claire,
le problème formulé de manière concrète,
le cœur de la solution,
les grandes lignes du modèle économique,
et, si possible, un indicateur qui renforce la crédibilité (early traction, prototype, premier client).
Pour synthétiser sans appauvrir, il est essentiel de choisir les bons mots. Chaque terme doit être factuel et compréhensible par un lecteur non spécialiste. Les formulations creuses doivent être évitées au profit de descriptions simples : “Plateforme B2B de gestion de stocks pour épiceries marocaines” vaut mieux que “solution innovante qui transforme l’expérience retail”.
La hiérarchie visuelle joue aussi un rôle clé. Une slide avec un titre, trois sous-éléments et un chiffre clé lisible sera toujours plus efficace qu’un bloc de texte dense. L’objectif est de guider le regard, pas d’imposer un effort de lecture.
Enfin, la crédibilité repose sur la vérifiabilité. Si un fondateur mentionne un test utilisateur, un prototype opérationnel ou une traction précoce, ces éléments doivent être réels. Les investisseurs marocains sont de plus en plus attentifs aux preuves de faisabilité, notamment dans les secteurs réglementés comme la fintech, l’agrifood ou la santé digitale.
Une synthèse bien construite montre que l’équipe maîtrise son exécution et connaît son marché. Elle prépare l’investisseur à aborder les slides suivantes avec confiance.
3. Adapter l’executive summary au Maroc : préciser le contexte sans l’alourdir
Pour un projet marocain, l’executive summary doit intégrer un niveau de contextualisation adapté au marché local, sans devenir trop descriptif. Les investisseurs basés au Maroc fonds, family offices, accélérateurs connaissent les réalités du terrain. Un executive summary efficace s’appuie donc sur des éléments concrets plutôt que sur des généralités.
La première adaptation consiste à préciser la cible locale. Un projet destiné aux PME marocaines, aux coopératives agricoles, aux établissements scolaires ou aux transporteurs logistiques doit l’indiquer clairement. Cela permet à l’investisseur d’évaluer rapidement la taille du marché, les contraintes réglementaires et les besoins spécifiques.
La deuxième adaptation concerne l’environnement réglementaire. Pour certains secteurs, il est utile d’intégrer une mention rapide : conformité aux normes de paiement, autorisation sectorielle nécessaire, ou dépendance aux acteurs publics comme l’ANRT ou Bank Al-Maghrib. Une phrase suffit ; l’objectif n’est pas de faire un cours de droit, mais de montrer que le fondateur a identifié les contraintes clés.
La troisième adaptation repose sur les preuves locales. Un test utilisateur réalisé dans un Technopark, une première traction auprès d’un CRI, un pilote dans une PME industrielle ou un partenariat avec une coopérative apporte beaucoup plus de poids qu’un exemple étranger mal contextualisé.
L’executive summary n’est pas une vitrine, mais un outil de cadrage. Il donne à l’investisseur la première compréhension structurée du projet et conditionne la qualité de lecture du reste du pitch deck. Un fondateur marocain qui maîtrise cette slide montre non seulement qu’il connaît son marché, mais aussi qu’il sait synthétiser l’essentiel sans dénaturer son modèle. Cette compétence fait partie des signaux que les investisseurs recherchent réellement.