Hamza Bouandoum, jeune ingénieur formé à l’UM6P, veut réduire de moitié les erreurs de traçage sur les chantiers grâce à la robotique. Sa startup Corosols automatise une étape clé de la construction et promet un bond de 300 % en productivité.
Sur les chantiers marocains, près de 12 % du budget est gaspillé à corriger des erreurs de traçage. Un ingénieur de 27 ans ambitionne de supprimer cette ligne comptable.
Lors de la Semaine de l’Énergie MSN 2024, Hamza Bouandoum, fondateur de la startup Corosols, a dévoilé une innovation qui pourrait marquer un tournant dans le secteur du BTP au Maroc : un robot capable de tracer les plans d’un chantier directement sur le sol, à partir de fichiers numériques, avec une précision au centimètre.
Cette solution, encore en phase de prototypage, s’attaque à une étape souvent négligée mais stratégique : le traçage des plans d’exécution. Traditionnellement manuel, ce processus est source de retards, d’imprécisions et de surcoûts. Corosols propose de le digitaliser et de le robotiser, avec un objectif clair : fiabiliser les chantiers, réduire les erreurs et libérer du temps aux équipes terrain.
Un problème structurel bien connu
Selon une étude interne à l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), jusqu’à 12 % du budget d’un projet de construction peut être absorbé par des reprises de travaux dues à des erreurs de traçage. Ces erreurs ralentissent les opérations et provoquent une chaîne de rectifications coûteuses. Le secteur, encore largement dépendant de méthodes manuelles, manque d’outils numériques simples et accessibles.
Hamza Bouandoum, ingénieur diplômé de l’UM6P, a fondé Corosols – pour Construction Robotic Solutions – avec l’idée de résoudre ce point de friction. Son robot fonctionne de manière autonome : il importe les plans 2D ou les modèles BIM et les reproduit à l’échelle réelle au sol, en utilisant de la peinture en spray. Ce processus remplace le traçage manuel, traditionnellement effectué par des ouvriers avec des mètres, des lasers et des cordes.
Prototypage avancé, impact mesurable
Aujourd’hui, le prototype de Corosols atteint une précision de l’ordre du centimètre. L’équipe travaille à réduire cette marge à l’échelle millimétrique grâce à l’intégration de stations robotisées plus performantes. Des tests sur site sont en cours avec plusieurs entreprises marocaines du secteur, en vue d’un déploiement à plus grande échelle.
Les premiers résultats sont prometteurs : selon les données recueillies par la startup, l’utilisation du robot permettrait de réduire de 50 % les reprises de travaux et d’augmenter de 300 % la productivité sur la phase de préparation du chantier. Un levier d’efficacité particulièrement pertinent dans les zones urbaines à forte densité de projets.
Intégration BIM et sécurité renforcée
L’un des points forts du système développé par Corosols réside dans sa compatibilité avec les standards BIM (Building Information Modeling). Cela permet une synchronisation en temps réel entre le plan numérique et l’exécution physique, garantissant une meilleure cohérence et une anticipation des erreurs.
En parallèle, la startup met en avant un avantage souvent oublié : la sécurité. En automatisant une phase de travail fastidieuse, Corosols réduit les déplacements au sol, limite les manipulations manuelles et diminue ainsi les risques d’accidents, en particulier sur les grands chantiers.
Un potentiel au-delà du BTP
Si la solution s’adresse d’abord aux acteurs de la construction, ses usages pourraient s’étendre à d’autres secteurs : aménagement de routes, déploiement de réseaux d’infrastructures, traçage industriel. La capacité à imprimer des plans complexes au sol avec précision ouvre de nouvelles perspectives d’automatisation dans des environnements encore peu numérisés.
Prochaine étape : industrialisation
Corosols entre désormais dans une phase critique : l’industrialisation de la solution. L’équipe, composée de profils techniques et business, cherche à lever des fonds pour produire une première série de robots en petite série et nouer des partenariats commerciaux.
« Nous voulons faire du robot de traçage un outil standard sur les chantiers marocains et africains, à la portée des PME comme des grands groupes », explique Hamza Bouandoum, qui vise un déploiement progressif au Maroc avant d’envisager d’autres marchés en Afrique.
En alliant robotique, numérique et pragmatisme industriel, Corosols s’attaque à un maillon faible mais crucial de la chaîne de construction. Une avancée technologique qui pourrait bien repositionner le Maroc comme terre d’innovation BTP sur le continent.